Entretien exclusif avec Zino Touafek : l’étoile montante d’une mode algérienne affranchie

Qui est Zino Touafek ?

Originaire d’Alger, Zino Touafek vit à El Mouradia et poursuit ses études aux Beaux-Arts tout en développant son activité de créateur. “Je suis simple d’esprit, dynamique… et très sensible”, dit-il. Trois mots qui résument la profondeur et la fraîcheur de son univers.

Un parcours instinctif, né de l’enfance

Zino se décrit comme un créateur né. Dès l’enfance, il dessinait des vêtements pour les poupées de ses cousines. “Je suis né au milieu des paillettes et des tissus”, confie-t-il. Aujourd’hui, il maîtrise à la fois le stylisme – la création artistique – et le modélisme – la construction technique des pièces. Une rare dualité qui confère à ses collections un souffle unique.

Un premier coup d’éclat dès 18 ans

Sa toute première collection, il l’a présentée en 2004, à l’auditorium de l’ESTHB, devant 4000 étudiants. “Un moment inoubliable”, qu’il garde en mémoire comme le véritable point de départ de son aventure stylistique.

Bisous Bisous : la collection de la maturité

“Chaque collection est un enfant”, affirme-t-il. Mais s’il devait en choisir une, ce serait “Bisous Bisous”, qui marque une évolution décisive dans son travail et l’a propulsé sur le devant de la scène.

Une vision intuitive de la création

“La créativité, c’est une beauté qui naît de rien”, explique Zino. Ses inspirations sont multiples : une silhouette croisée dans la rue, un geste, une émotion. Il affirme même qu’“une mouche peut déclencher une idée”. Son style, profondément contemporain, puise dans l’humain et les détails du quotidien.

Entre patrimoine et modernité

Fidèle à ses racines, Zino Touafek s’inspire de l’histoire nationale, des femmes élégantes d’antan – les emhadjyattes –, et bien sûr d’Alger, avec ses paradoxes et son effervescence. Il avoue une tendresse particulière pour le karakou, sans pour autant revendiquer encore sa maîtrise complète : “Je suis encore jeune pour prétendre dominer un tel monument vestimentaire.”

Des références fortes, un regard libre

Parmi ses influences, on retrouve Karim Sifaoui pour ses robes de mariée féériques, Karl Lagerfeld pour son génie créatif, ou encore Mondrian pour la rigueur géométrique de ses œuvres. Côté création traditionnelle, le mouvement orientaliste nourrit ses imaginaires.

Un hommage détourné à Kenzo ?

Dans sa dernière collection, une robe aux fleurs rouges a évoqué Kenzo à certains spectateurs. Une coïncidence involontaire : “Elle rendait hommage aux couleurs nationales, mais si elle vous rappelle Kenzo, j’en suis flatté”, sourit-il.

Confidences sur une collaboration discrète

Interrogé sur une collaboration avec Karim Sifaoui, il répond avec malice : “Oui, mais je dois rester discret… Le métier veut ça.”

Une mode pour les femmes d’aujourd’hui

Chez Zino Touafek, la femme est lumineuse, libre et conquérante. “La femme algérienne s’impose, elle rayonne. Mes créations sont là pour l’accompagner, lui offrir de la force et de la fraîcheur. Et casser certains tabous sur le vêtement, le corps, la visibilité.”

Photographie, design… un esprit touche-à-tout

Outre la mode, Zino s’épanouit aussi dans la photographie – “capturer l’instant m’émerveille” – et dans le design. Il a notamment collaboré avec l’entreprise algéro-française MCL pour aménager des hôtels et restaurants branchés dans l’Ouest algérien. Un autre champ d’expression pour son sens du détail.

Et après ?

Pour l’avenir, il rêve de voyages, de rencontres, de créations croisées avec d’autres cultures. Mais d’abord, il souhaite terminer brillamment ses études.

Un dernier mot ?

“Je remercie Dziriya pour ce beau travail. Ce site donne un vrai espace aux créateurs algériens. J’espère qu’un jour, cet espace deviendra un lieu réel, vivant, comme un festival de la mode algérienne. L’union des talents est indispensable si l’on veut faire briller notre patrimoine vestimentaire au-delà des frontières.”